La série d’Arte, que nous avons tous tant aimée et dont nous attendons avec impatience la saison 2, est adaptée par Eric Toledano et Olivier Nakache d’une série israélienne « Be Tipul ». Elle campe le décor : un cabinet d’un psychiatre psychanalyste « bo-bo» qui reçoit cinq patients au lendemain des attentats du 13 novembre.

Chaque épisode déroule le portrait de chacun des patients qui arrive avec ses blessures, ses attentes, ses colères et ses provocations dans le contexte d’un lendemain d’ondes de choc dont les conséquences semblent difficilement palpables au moment où débute la série. C’est ce lendemain d’attentat et la sidération qui y est attachée qui relient les patients les uns aux autres, c’est ce drame collectif qui les jette dans une urgence de parler chacun pour lui-même.

Et nous – spectateurs – assistons avides, à chaque échange de mots, de regard, chaque estocade, chaque émotion, chaque maladresse, chaque aller et retour entre le patient et le thérapeute, en nous identifiant tantôt à l’un tantôt à l’autre. Nous vibrons au rythme de l’avancée des séances et de ce qui s’y joue et se dénoue pour le patient.

Est-ce que le psychanalyste saura résister aux attaques du patient ? Est-ce qu’il saura éviter les provocations répétées des patients qui rejouent leurs propres conflits dans le cadre de ce tête-à-tête ? Saura-t-il « encaisser » et formuler les mots justes, ceux qui toucheront le patient et qui permettront à la séance de se poursuivre et au patient de revenir ?

La confiance s’installe peu à peu et nous nous surprenons à espérer que le psychanalyste saura « contenir » chaque patient et l’aider à affronter ce qui émerge au fur et à mesure des séances.

Pourquoi diable aller faire une thérapie puisqu’elle sera nécessairement le lieu de douleurs, d’émotions vives, de frustrations et souvent de colère ? Pourquoi aller payer un psychanalyste pour « être écouté » ? Pourquoi, comme l’un des personnages de la série qui fait un passage à l’acte ultime dans l’un des épisodes, aller « creuser là où la douleur est immense » quitte à en mourir ? A quoi sert donc de faire un travail de psychothérapie ou de psychanalyse ?

Souvent, la démarche est déclenchée par un événement particulier ou des circonstances qui nous font basculer dans un état d’urgence où l’idée d’aller consulter un « psy » s’impose comme une évidence. C’est bien ce qui est dépeint dans cette série à succès. Nulle autre considération ne tient, ni la question de l’argent, ni la question de l’utilité, ni celle du coût émotionnel puisque le sentiment d’inconfort l’emporte par-dessus tout autre.

Démarrer une thérapie s’impose à soi quand l’on souffre comme l’on souffre d’une blessure qu’il faut soigner. C’est une démarche plus ou moins longue qui répond à une exigence incontournable : celle d’aller mieux. Et puis, ensuite, plus tard, si la rencontre avec le thérapeute advient, si les séances permettent au patient de trouver un apaisement, de se renforcer, la thérapie peut alors être comparée à une pratique « d’assouplissement psychique », un peu comme un travail d’entretien de son corps à travers le sport.

Guérir ? Se soigner ? Se rétablir ? S’entretenir ? Se renforcer ? Autant de raisons de faire une thérapie, ce moment unique dans une vie où l’on s’accorde le droit de s’aimer et de se regarder au fond.

Annie Cohen
09/07/2021